Le long parcours royal du nouveau
Pharaon, le jeune
Ramsès II Ouser-Maât-Rê-Setepen-Rê peut alors commencer. Pharaon entame un long périple au cœur de son pays, il se rend en compagnie de sa jeune épouse la belle Nefertari au lieu saint d’
Abydos, il décide d'y construire son propre temple non loin de celui de son père qu’il a tant admiré et, enfin, il remonte le
Nil vers Thèbes. Là, il poursuit l’œuvre architecturale de Seti I dans le beau temple de
Karnak ainsi que dans celui de
Louxor. Puis, il traverse le fleuve et à la lisère des terres cultivables, il vient visiter le grand chantier qui occupera une bonne partie de son règne et qui débuta en l’an I, celui de la colossale construction de son Château des Millions d’Années baptisé Château d’Ouser-Maât-Rê qui s’unit à Thèbes dans le domaine d’Amon.
J’ai eu la chance de visiter ce temple et je dois avouer, qu’à l’instar du temple de Ramsès III de
Medinet-Habou, il m’a très fortement impressionnée. Il se dégage de ces ruines une intimité diffuse, un je-ne-sais-quoi de familier qui trouble l’âme. Il me semblait, lorsque je déambulais au cœur du temple, être déjà venue sur ces lieux, une étrange alchimie teintait le dépaysement que j’éprouvais d’être ici, en ces lieux si chargés de souvenirs, d’une curieuse sensation de bien-être. Autant Karnak et Louxor peuvent écraser par leur majesté, leur splendeur et leur démesure et en cela, ils m’éloignent de l’âme égyptienne, autant le Ramesseum ou Medinet-Habou me rapprochent d’une vie passée exceptionnellement palpable : au-dessus de ces ruines, plane encore l’esprit de Ramsès II.
Bien des visiteurs antiques furent impressionnés par ce temple comme nul autre en Egypte : ainsi, Hécatée d’Abdère en fait une première description puis
Diodore de Sicile est charmé à son tour et lui donne le nom de tombeau d’Osymandias, transcription grecque du nom de Ramsès II,
Ouser-Maât-Rê. Strabon s’y intéresse aussi, le mentionne dans ses écrits mais tout se précipite à l’époque ptolémaïque lorsque des carriers bien mal intentionnés commencent leur patient travail de démantèlement, ce sont des pans entiers de monuments qui sont dispersés en d’autres lieux. Et comme si la bêtise des hommes ne suffisait pas, la nature apporte sa dure contribution à la destruction du site sous forme de séismes violents qui précipitent encore un peu plus la dégradation du temple. Plus tard, le Ramesseum sera même transformé en église tout comme le fut Medinet-Habou.
L’expédition de Bonaparte constituée d’une armada de savants, d’historiens et de scientifiques éclaire d’un jour nouveau cette partie de la vallée thébaine où furent construits Les Châteaux des Millions d’Années des grands Pharaons du Nouvel Empire, les temples sont scientifiquement étudiés, des relevés sont effectués mais toute médaille à son revers, malheureusement ! L’engouement que suscite l’Egypte durant cette période lui permet de sortir de l’ombre millénaire qui la recouvrait mais, paradoxalement, la fragilise car un juteux trafic d’antiquités est mis en place sur le territoire égyptien, commerce si regrettable qu’il incite Belzoni à ordonner l’évacuation d’un colosse de Ramsès II qui gisait dans la grande cour du Ramesseum.
Il faudra attendre la venue de
J.F. Champollion tout entier animé de sa passion égyptienne pour que soit enfin restitué à Ramsès II ce qui appartient à Ramsès II : en 1829, armé de son savoir, de ses relevés, de ses comparaisons et de son infaillible instinct il déclare :
" Je n’emploierai désormais, pour désigner cet édifice, que son nom égyptien même, sculpté dans cent endroits et répété dans les légendes des frises, il portait le nom de Rhamesseion parce que c’était à la munificence du pharaon Rhamsès le Grand que Thèbes en était redevable. "
En 1899, un autre grand nom de l’égyptologie moderne, tout aussi animé de sa foi en l’Egypte pharaonique est nommé sur les lieux pour tenter de sauver ce qui peut l’être encore,
Carter, le découvreur de
Toutankhamon vient au chevet du temple de Ramsès II. Puis, de 1903 à 1906, Baraize poursuit les travaux et, en 1965, le Centre de documentation sur l’Ancienne Egypte secondé par le CNRS procède à l’étude systématique du site.
Depuis 1991, les recherches sont conduites sous l’égide de C. Leblanc, chargé de recherche à l’Institut d’égyptologie thébaine. Un formidable groupe de mécènes s’est constitué autour du Ramesseum et chaque jour, les travaux de fouilles et de préservation avancent sous la tutelle du Conseil Suprême des Antiquités, Elf Aquitaine, le CNRS, la Laboratoire des ponts et chaussées, l’université du Caire, l’Association pour la sauvegarde du Ramesseum et bien d’autres encore. Les efforts, l’acharnement, la persévérance de ces hommes prouvent quotidiennement l’importance de ce monument d’éternité tout en révélant le personnage hors du commun qu’était Ramsès II.
A nous, maintenant, de découvrir ce fabuleux mémorial élevé en l’honneur d’un des plus grands Pharaons de l’Histoire égyptienne.