Le quai et le canal
Tout comme les temples de
Karnak ou
Louxor, Medinet-Habou était relié au Nil par un long canal de dérivation qui permettait aux barques processionnelles d’accoster lors des grandes festivités annuelles. Cet embarcadère faisait face à l’entrée du temple dotée d’une monumentale porte fortifiée.
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Porte ou migdol, muraille
Singulière entre toutes, unique sur le sol égyptien, cette porte située à l’est du temple, appelée
migdol a voulu imiter l’image de la porte fortifiée syrienne comprenant une haute tour crénelée percée de fenêtres. Et le résultat est original : ici, ce sont deux hautes tours de pierre qui s’élèvent vers les cieux conférant aux lieux un aspect tout à fait militaire et dissuasif. En son temps, cet ensemble abritait de grandes salles servant probablement d’appartement royaux. Cette porte dont le rôle protecteur ne fait pas de doute était ornée sur sa face extérieure des représentations des rudes batailles que Ramsès III avait livrées contre le Peuples de la Mer. Et, l’on voit encore défiler, afin de frapper encore plus les imaginations, l’armée victorieuse traînant à sa suite les prisonniers de guerre vaincus par le courage et la détermination de Pharaon. La face intérieure joue sur le répertoire des grandes scènes familiales, c’est la paix retrouvée que l’on découvre à l’intérieur de l’enceinte.
De chaque côté des deux hautes tours, court une muraille de pierre haute de dix-huit mètres accentuant encore davantage l’impression de forteresse inspirée par l’ensemble.
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Sanctuaire de la dynastie XVIII
Après avoir franchi la porte d’entrée, sur la droite, s’élèvent les vestiges des constructions de la dynastie XVIII. Et l’on peut constater qu’elles dépassent les limites de la muraille érigée par Ramsès III. Cette chapelle fut bâtie sur ce qui est considéré par les prêtres de la cosmogonie thébaine comme le tertre des origines, la fameuse butte de Djême dont nous avons parlé précédemment.
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Chapelle des Divines Adoratrices
Les Divines Adoratrices étaient les épouses mystiques d’Amon et leur pouvoir, en tant que prêtresses du grand dieu, était considérable. Les femmes ont toujours tenu une grande place dans la société égyptienne et, dans, le domaine religieux, elles jouaient le rôle de chanteuses sacrées. Puis, à la Basse Epoque, leur rôle se fit plus précis et elles devinrent symboliquement les épouses du dieu Amon. Cette fonction échut aux filles royales, aux jeunes princesses qui, pour l’occasion, devaient rester vierges et pures. Représentatives de la personne de Pharaon dans l’Egypte entière, il était normal qu’une chapelle leur soit consacrée : ici, il s’agit de deux petits monuments, l’un réservé à Aménardis, fille du roi Kasta (dynastie XXV), l’autre conçu pour Chepenoupet, fille de Piankhy et pour l’épouse de Psammetique I et de sa fille Nitocris.
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Premier pylône
Dans le prolongement de la grande porte d’entrée se dresse un majestueux pylône, le mieux conservé de toute la région thébaine sur le quel on peut lire les récits de la victorieuse bataille de Pharaon contre les Peuples de la Mer. Triomphant, ayant soumis à son autorité les prisonniers captifs, Pharaon savoure sa victoire sous la protection d’Amon-Rê et de Rê-Horakhty.
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Première cour
Cette première cour qui fait suite au premier pylône est flanquée, sur sa droite de piliers osiriens et, sur sa gauche, d’une ligne de colonnes papyriformes qui donne accès au palais royal.
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Palais royal
Ce portique qui servait donc de façade au palais aujourd’hui entièrement détruit, comprenait aussi une fenêtre des apparitions qui permettait à Pharaon de se monter à son peuple. Ce palais comprenait la Salle du Trône, la chambre royale, une salle de bains et trois petits appartements. Bel exemple de ce que pouvait être un palais royal, il était cependant trop exigu pour contenter et abriter la famille royale à temps plein et l’on suppose qu’il était mis en fonction uniquement lors des déplacements de Pharaon durant les grandes fêtes égyptiennes.
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Second pylône et deuxième cour
Une volée de marches conduit de la première cour à la seconde cour, la cour des fêtes ceinte sur deux de ses côtés de piliers osiriaques. Sur les murs de cette cour, remarquablement bien conservées encore de nos jours, sont gravées toutes les étapes de la Belle Fête de la Vallée. Cependant, à l’époque chrétienne, la majeure partie des statues élevées devant les piliers furent détruites pour permettre la construction d’une église.
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Le sanctuaire d’Amon
Au-delà de la seconde cour nous pénétrons dans le sanctuaire d’Amon précédé d’une salle hypostyle dotée de six rangées de quatre colonnes chacune et flanquée de salles destinées aux ancêtres du roi. Dans l’axe de cette hypostyle, deux autres salles du même type mais nettement plus petites mènent au sanctuaire tripartite dédié à la triade thébaine Amon, Mout et Khonsou. Malheureusement, il ne reste pas grand chose de l’agencement de ces salles reconnaissables seulement à l’aide d’un plan.
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Autres éléments du complexe
Tout près de l’ancienne construction de Hatchepsout, coincé entre celle-ci et le mur d’enceinte, on trouve l’emplacement du lac sacré (9), symbole des ondes primordiales et dont les eaux participaient aux rites de purification. Dans le prolongement de ce lac, un peu plus au Nord, les vestiges d’un nilomètre (10).
Medinet-Habou, un grand centre administratif.
Sous le règne de Ramsès III, son temple de Medinet-Habou fut le siège administratif du gouvernement et une ville s’y développa, important centre économique thébain. On y trouvait des magasins, les habitations des prêtres, des bureaux, une caserne et tout ce qui contribue à la vie quotidienne d’une cité. Mais Medinet-Habou s’étendait bien plus loin que les limites de ses propres murailles. On évalue le personnel à son service à près de 65 000 personnes oeuvrant soit sur place, soit dans les nombreuses dépendances de la région ou parfois, beaucoup plus loin comme dans la région du Delta où Medinet-Habou possédait de nombreux troupeaux et de belles vignes.
Les remparts de Medinet-Habou furent aussi les premiers à voir se manifester les toutes premières grèves de l’histoire, traductions légitimes du mécontentement des ouvriers de Deir el-Medineh venus chercher auprès de l’autorité royale le paiement de leurs salaires qu’ils étaient en droit d‘exiger et que certains fonctionnaires bien peu scrupuleux avaient détournés à leur profit. Les manifestants se couchaient comme l’on avait coutume de dire à cette époque, attendant patiemment au pied de la forteresse que leurs revendications soient entendues.