"Le but ultime d'une histoire de la Civilisation serait de faire approcher l'âme de ceux qui l'ont créée,
le foyer ardent d'où ont jailli les créations sociales, littéraires, artistiques d'un monde qui,
bien que disparu depuis deux mille ans,
nous fascine encore par ses réussites et ses prestiges."

François Daumas
Le moteur politique : l’idéologie royale
Le moteur économique : l’administration étatique
Le pouvoir révélé : les pyramides
L’Ancien Empire et le monde extérieur
Dynastie III
Dynastie IV
Dynastie V
Dynastie VI
Dynasties VII et VIII
Tableau historique des Périodes égyptiennes
Un grand nombre d’institutions politiques, administratives, sociales étaient nées durant la mise en place des premières dynasties de l’ère thinite. Le foisonnement génial d’idées qui avaient animé cette période, avait permis l’émergence d’une conscience nationale arbitrée par une pouvoir fortement centralisé. Le gouvernement monarchique remis entre les mains d’un Pharaon-dieu et l’attribution des plus hautes fonctions étatiques aux membres de la famille royale, la montée en puissance d’une bureaucratie extrêmement structurée étaient autant d’outils performants pour atteindre une unification tant culturelle que politique.
Cependant, il est très difficile de brosser un portrait fidèle et exhaustif de la période qui va naître de cette révolution idéologique : l’Ancien Empire. Malgré les textes, les sources matérielles et autres données archéologiques, les informations sont brèves et sporadiques. Quelques mots suffiraient pourtant à personnaliser cette période glorieuse qui va durer près de cinq siècles, de la dynastie III à la dynastie VI : efficacité, splendeur, démesure, prestige, ingénieuse création politique, renommée internationale, prodigieuse croissance dans tous les domaines. Vocables auxquels il faudrait ajouter des expressions caractéristiques de cette époque : pyramides, mastabas, temples solaires, Textes des Pyramides, etc.
Nous allons faire connaissance avec les acteurs principaux de ces moments d’apogée. Chaque dynastie qui déroule l’écheveau de son histoire au fil des années qui passent et des Pharaons qui se succèdent apporte sa contribution originale à la construction d’une Egypte puissante et splendide. Mais avant de nous fondre dans le dédale dynastique de l’Ancien Empire, tâchons de brosser une vue d’ensemble de la machine politique et administrative habilement manœuvrée et contrôlée par un demi dieu : Pharaon.
LE MOTEUR POLITIQUE : LE ROI ET L'IDEOLOGIE ROYALE
Au-dessus de tous, puissance unique, autorité absolue, Pharaon règne sur le pays toute entier, Haute et Basse-Egypte réunies sous la Double Couronne, Pharaon omnipotent dont le pouvoir issu des dieux ne peut être contesté. Toute la société reposait sur le roi à la fois gardien de son peuple (bon berger qui veille sur son troupeau) mais aussi responsable devant lui du bon fonctionnement du pays. C’est pourquoi, tous les efforts des Egyptiens se portèrent, et ce tout au long de l’Egypte pharaonique, vers l’élaboration d’une idéologie royale efficace et représentative de l’image que l’on voulait donner de Pharaon : un monarque tout-puissant issu des dieux et garant de l’ordre universel. En médaillon Amenhotep II, Nouvel Empire.
Nous avons vu que, dès l’aube thinite, le protocole royal avait fait de Pharaon un Horus qui commandait sur terre comme l’Horus, divin faucon, le faisait dans le ciel : il est l’Horus d’Or. De plus, la présence des deux déesses tutélaires, Nekhbet et Ouadjet, assurent sa protection et fondent en droit son pouvoir : il est Celui des Deux Dames, le Roi de Haute et de Basse-Egypte. Mais comme si cela ne suffisait plus à signifier l’aura extraordinaire qui entoure Pharaon, un nouveau titre est ajouté vers le début de la dynastie V au protocole royal, celui de Fils de Rê. Peut-être voulait-on par cette conception nouvelle concrétiser les prétentions de Pharaon à gouverner, au-delà des frontières égyptiennes et du cosmos, sur le monde entier. Héritier du soleil, Fils de Rê, le grand démiurge par excellence qui organisa le monde créé, quelle belle perspective, quel ambitieux programme ! Mais les responsabilités sont lourdes de conséquences pour la personne royale ainsi glorifiée : garant de la bonne marche du Double-Pays (bon fonctionnement du système fluvial, récoltes abondantes), il doit repousser les forces néfastes et nuisibles, mettre en déroute les ennemis de l’Etat, repousser les attaques au-delà des frontières. En médaillon Amenhotep III Nouvel Empire.
Cette filiation au grand dieu a pour conséquence d’établir comme religion d’Etat la théologie héliopolitaine élaborée dans les temples d’Héliopolis. Le devenir post-mortem de Pharaon doit être garanti dans les meilleures conditions possibles : sa montée vers le ciel où il rejoindra le dieu, son père, mérite un appareil architectonique à la mesure de son ambition : la pyramide, immense escalier projeté vers le ciel, participera à sa résurrection qu’un culte funéraire entretiendra ardemment. Puis, sous la dynastie V, le temple solaire contribuera au culte de Pharaon, fils de Rê, culte joué à ciel ouvert sous la lumière divine de l’astre solaire.
Pharaon détient tous les pouvoirs, sa mainmise sur les Deux-Terres est incontournable. La richesse monumentale des constructions royales prouvent, s’il en faut, l’efficacité du pouvoir royal qui, grâce à son armée administrative et un système de taxation infaillible, recrute ouvriers permanents et main d’œuvre occasionnelle sur les grands chantiers.En médaillon Amenhotep III Nouvel Empire

LE MOTEUR ECONOIMIQUE : L'ADMINISTRATION ETATIQUE
Depuis Ménès, la capitale des Pharaons se trouvait à Memphis. Tous les ordres partaient du Palais royal memphite pour se propager à travers le pays tout entier par le truchement d’innombrables fonctionnaires zélés. C’est le roi qui nomme ses administrateurs, le plus souvent issus de la lignée royale ou de l’entourage royal. Pourtant, sous la dynastie V, ces hautes charges échappèrent progressivement aux parents du roi pour atterrir entre les mains de personnages plus modestes. A la plus haute marche, il y avait le vizir, tchaty, (parfois deux), improprement appelé de nos jours premier ministre ayant autorité sur les autres ministères : grenier, justice, trésor, travaux publics. Les surintendants veillaient aux travaux agricoles tandis que les chefs des travaux publics veillaient à la réalisation des grands projets architecturaux. Les Surintendants des levées de terre s’occupaient du recensement tandis que les harpédonaptes calculaient les superficies des terres. On trouve aussi le Chancelier de Haute-Egypte et le Chancelier de Basse-Egypte, le Président de la Maison Rouge et le Président de la Maison Blanche (impôts). Et encore autant de titres et fonctions dont l’organisation nous échappe encore. En médaillon Kephren Ancien Empire
Le pouvoir royal était délégué dans les provinces aux nomarques, gouverneurs des nomes ou sepat qui divisaient l’Egypte en quarante-deux circonscriptions. Directement issus de l’administration centrale, ces nomarques ne posèrent pas de problèmes majeurs durant l’histoire des dynasties III, IV, et V. Mais, peu à peu, Pharaon perdit tout contrôle sur ces fonctionnaires un peu trop ambitieux, évidemment bien loin de la surveillance effective du Palais de Memphis. La fonction de nomarque, à l’origine agréée par le Roi évoluera lentement mais sûrement vers une charge héréditaire transmise en dehors de toute appréciation royale. Il est évident qu'à long terme, cette puissance montante des provinces pouvait devenir une menace pour l’autorité royale. Malheureusement, cette hypothèse se révélera juste et participera, entre autres événements, à la chute de l’Ancien Empire. Les superbes tombeaux situés de plus en plus en Haute-Egypte ou en Moyenne-Egypte, bien loin de Memphis, révèlent leur puissance et leur indépendance et contrastent avec les maigres constructions des souverains des dernières dynasties de l’Ancien Empire. En médaillon Pepi I Ancien Empire
Pour coordonner tous ces éléments, il fallait inventer le plus ingénieux des outils, celui qui allait permettre d’enregistrer les évènements, de fixer les tâches de chacun, les obligations de quiconque vivant sur le territoire égyptien : l’écriture, moteur essentiel pour atteindre l’efficacité dans tous les domaines. Mise en place dès les premiers temps historiques, l’écriture hiéroglyphique devint l’apanage d’un groupe de fonctionnaires consciencieux et imbus de leur supériorité, figures incontournables de l’administration égyptienne : les scribes. Voir Hiéroglyphes, signes sacrés.
L’armée proprement dite, une armée de métier permanente, n’existait pas : en cas de besoin, on mobilisait les forces locales. Quant aux temples, ils bénéficiaient des largesses royales et, tout comme pour les nomarques, ces privilèges exacerbés au bénéfice du clergé accélèreront le déclin royal. En médaillon le Sema Taouy, l'Union des Deux Terres
Voir pour informations complémentaires : Pharaon et Organisation de la société.
LE POUVOIR REVELE : LES PYRAMIDES
L’Ancien Empire est la période bénie de la grande architecture des mastabas, des pyramides et des temples solaires. Témoins de la puissance pharaonique et de l’idéologie montante qui veut faire du souverain, un roi dieu qui aspire à remonter dans les cieux auprès de son père le dieu Rê, ces monuments sont étudiés dans Arts et Monuments.
L’ANCIEN EMPIRE ET LE MONDE EXTERIEUR
Les Pharaons de l’Ancien Empire n’ont pas été de simples promoteurs de constructions gigantesques et leurs préoccupations ne se sont pas non plus limitées à assurer leur devenir dans l’Au-Delà. Des excursions hors des frontières s’intensifient :
Vers l’Est, des expéditions vers les mines de cuivre et de turquoise sont menées avec succès, des échanges avec Byblos en vue d’échanges commerciaux portent leurs fruits.
Vers l’Ouest, on se préoccupe de rentabiliser et de coloniser les oasis tandis que la Nubie et, plus loin, le mystérieux pays de Pount, offrent des possibilités non négligeables.
Dans le chapitre suivant, l’étude plus complète de chaque dynastie précisera le rôle tenu par les Pharaons successifs hors des frontières.

Les dynasties III à VIII ICI

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