
La Moyenne Egypte est une région essentielle pour appréhender la période du
Moyen Empire. Durant la
Première Période Intermédiaire, les nomarques égyptiens ont vu leur autonomie et leur puissance croître considérablement. A l’origine nommés par Pharaon, leur charge devient rapidement héréditaire ce qui précipite, entres autres raisons, la chute de l’
Ancien Empire

Très rapidement, ils deviennent de puissants seigneurs en quête d’indépendance et d’autonomie par rapport au pouvoir central. Les gouverneurs portent alors des titres ronflants, à la mesure de leur puissance tant religieuse que politique : ils sont
haty-â, celui dont le bras est en avant, mer hemounetjer, celui des prêtres, ou hery-tep-âa, grand supérieur en chef. En Moyenne Egypte, les princes d’Héracléopolis se disputent le pouvoir avec les princes thébains. Ils laisseront, creusées dans le flanc de la montagne, des tombes qui sont de véritables livres ouverts retraçant avec emphase leur vie quotidienne et leurs activités politiques.
Tout visiteur qui se promène aujourd’hui en Moyenne Egypte à la recherche de ces tombes illustres perçoit très rapidement, au sein de ce paysage grandiose, toute la puissance et l’orgueil des nomarques du Moyen Empire. Les hypogées de Beni-Hassan sont creusées dans les flancs de la montagne orientale. Par contre, d’autres nécropoles seront aménagées sur la rive occidentale du Nil telles Meir, Assiout ou Deir Rifeh.

La nécropole de Beni-Hassan est creusée le long d’une longue strate de calcaire horizontale et les façades des tombes qui imitent les belles façades de palais sont visibles de loin Photo. Jusqu’à la dynastie XI, les tombes présentent un plan d’ensemble composé de salles vastes et simples. Puis, tout devient plus complexe, la tombe se transforme en un véritable palais d’éternité digne des plus grands rois : la façade se transforme et prend l’aspect d’un portique à colonnes, on introduit des colonnes dans des salles de plus en plus imposantes, les plafonds sont richement décorés de fresques les plus originales Photo. Le plan d’ensemble ne varie guère de celui qui orchestrait les mastabas de l’Ancien Empire : on y retrouve la chapelle où officient les prêtres, la stèle fausse-porte qui relie le défunt au monde des vivants, le serdab qui abrite la statue du propriétaire et enfin le puits qui conduit à la chambre sépulcrale. La seule différence notable vient de l’orientation donnée à l’ouverture de la tombe qui regarde maintenant vers l’Ouest et non plus vers l’Est.

La nécropole de Beni-Hassan comprend près de trente neuf tombeaux dont douze sont décorés et cinq dans un état exceptionnel.

Les tombes d’Assiout sont, malheureusement, très dégradées mais elles comptent parmi les plus imposants complexes funéraires du Moyen Empire. Il faut ici employer le terme de complexe, à l’instar des complexes funéraires royaux car ces tombes possédaient, un peu plus bas dans la Vallée, des édifices tels qu’une chaussée montante, un pylône, un cour, une terrasse pourvue d’une salle hypostyle.

A Thèbes, un nouveau type de tombe prend naissance, le type des tombes
saff : la façade de la tombe qui s’enfonce au cœur de la montagne est dotée d’une ou deux rangées de piliers taillés directement dans la pierre. Cette entrée est précédée d’une vaste cour entourée d’un mur d’enceinte. Une fois l’entrée de la tombe proprement dite franchie, un couloir axial mène à la chapelle funéraire puis à un puits conduisant à la chambre funéraire. Ce type de tombe préfigure les futurs hypogées royales du Nouvel Empire.

Mais s’il fallait retenir une impression d’ensemble, il faudrait s’attarder sur la vie extraordinaire, le dynamisme incroyable qui s’échappent des scènes peintes sur les murs. Tout comme pour les tombes de l’Ancien Empire, c’est la vie quotidienne qui est dessinée sur les parois des multiples salles. A Beni-Hassan, les artistes ont opté pour l’utilisation de la peinture et ont délaissé la technique du bas-relief tandis qu’à Meir les compositions murales se présentent sous l’aspect de bas-reliefs peints. Peut-être devons nous attribuer à ce choix unique de Beni-Hassan des difficultés liées à la médiocre qualité de la pierre ou à un désir de gain de temps. Toujours est-il que, libérée déjà durant la Première Période Intermédiaire des canons stricts de l’Ancien Empire, la peinture diffuse avec bonheur des scènes claires et extrêmement lisibles. L’organisation en registres des différentes scènes n’a plus cours ou on la remplace par des lignes plus fines qui marquent le sol sur lequel évoluent les personnages. Les peintres n’hésitent pas à utiliser une palette de couleurs où les contrastes les plus marqués côtoient les nuances les plus délicates. La liberté prise dans le tracé du pinceau, le passage nuancé et subtil d’une couleur à l’autre permettent de recréer des ambiances et des atmosphères d’une grande originalité et d’un impressionnant réalisme.

Tout comme pour l’Ancien Empire, le répertoire iconographique tend essentiellement à traduire la vie quotidienne dans des thèmes aussi variés que la culture, l’élevage, l’artisanat. Des hommes moissonnent les champs, des femmes se préoccupent du repas et cuisinent la pâte qui donnera le pain (préparation du pain) (repas funéraire). Les peintres dessinent encore et toujours les fourrés de papyrus (tombe d’Ankhtifi) et dessinent avec une grande délicatesse mêlée de vivacité des oiseaux perchés sur la cime d’un acacia (tombe de Khnoumhotep) (papyrus) (oiseau). Ma préférée et la plus attendrissante de toutes est celle d’un petit âne portant sur son dos un double panier. Les contours nets et précis du petit animal, ses doux yeux en amande traduisent l’attention que l’artiste a projeté sur cette gentille bête si utile et si présente dans la vie de l’Egyptien antique (tombe de Ti)
Parmi les tombes les plus illustres de Beni-Hassan, citons celle de Kheti, gouverneur du seizième nome sous la dynastie XI, la tombe d'Amenemhat et la tombe de Khnoumhotep.Mais l’on découvre aussi les scènes classiques d’offrandes au défunt que l’on avait déjà étudiées dans les mastabas de l’Ancien Empire.Je vous propose de partir à la découverte d'autres tombes en compagnie de Thierry Benderitter/Osiris sur les pages qu'il a créées en l'honneur des gouverneurs de Beni Hassan :http://www.osirisnet.net/tombes/autres/tmbautre.htm

Il est intéressant de constater que toutes ces scènes, à l’origine créées pour permettre au défunt d’accéder à l’au-delà, nous offrent une idée très précise de la vie égyptienne au Moyen Empire. Image projetée de la puissance de son propriétaire, preuve incontestable de sa puissance dans le monde des vivants et du détachement qu’il tend à souligner par rapport à Pharaon, la tombe du nomarque du Moyen Empire est un procédé incomparable pour faire connaître à tous, et ce pour l’éternité, sa position élevée dans la vie économique et politique du pays. Il fut le gouverneur de son nome auprès du roi dans le monde des vivants, sa charge était primordiale, c’est par elle que s’organisait une bonne gestion du pays. Il deviendra sûrement un bon gouverneur pour les dieux et sa place auprès d’eux sera incontestable.