Plan de Deir el Medineh
Présentation du Village
Organisation du Village
Autour du Village
Les Serviteurs de la Tombe
Personnages pittoresques

Album I Deir el-Medineh
Album II Deir el-Medineh
Album III Deir el-Medineh
LES DEUX NECROPOLES
La nécropole de l'Est
Très occupés à creuser la demeure d'éternité de Pharaon, les artisans du petit Village n'ont pas oublié pour autant leur propre devenir post-mortem. Ne sont-ils pas les mieux placés, les plus expérimentés aussi, pour mettre à leur profit les compétences qu'ils ont acquises au fil du temps et que les pères ont léguées aux fils afin que jamais ne périsse leur savoir-faire ? Ainsi, durant leurs jours de repos, les Serviteurs de la Place de Vérité ont-ils aménagé de chaque côté de pa demi des cimetières pour abriter leurs défunts.
Le cimetière de l'Est blotti contre le flanc du massif de Gournet Mouraï peut être daté de la dynastie XVIII et plus précisément des règnes de Hatchepsout et Thoutmosis III. Très probablement, cette nécropole fut-elle en priorité réservée aux familles les plus pauvres et aux enfants, l'autre, celle de l'Ouest étant réservée aux plus nantis. Mais de nos jours, il ne reste plus grand chose d'apparent de ces premières tombes orientales qui, pour la plupart, sont de simples fosses creusées dans la colline.
La nécropole est divisée en trois étages : la partie basse pour les enfants en bas âge, voire même pour les fœtus, la partie médiane pour les adolescents et, enfin, la partie supérieure pour les adultes et les personnes très âgées. De facture très simple, les parois de ces "puits" ne présentent aucun décor, aucune peinture que l'on trouvera par contre très bien représentée au sein de l'autre cimetière, de l'autre côté du Village, cimetière étagé sur les flancs de la montagne thébaine. La richesse de ces tombes est en fait due à l'important matériel funéraire que l'on retrouva à côté des sarcophages, matériel d'une très grande simplicité mais hautement intéressant par les marques d'usure qu'il présente, preuve qu'avant d'être mis à la disposition du défunt, il avait largement contribué au confort du vivant. Grâce à ces objets que les archéologues ont eu le bonheur de trouver en grand nombre, les égyptologues ont pu révéler les grands lignes du quotidien de ces Egyptiens partagés entre travail et loisirs. Ce sont ainsi des éléments du mobilier, chaises, chevets, tabourets, nattes, coffres, de la vaisselle sous toutes ses formes, jarres, coupes, pots mais aussi des objets de toilette, vases à onguents, pots à khôl, peignes, miroirs, des instruments de musique que l'on a retrouvés soigneusement déposés près du défunt.

La nécropole de l'Ouest
Conséquence probable de l'extension du Village, notamment sous Ramsès II, priorité fut donnée, peu à peu, à l'autre nécropole, celle de l'Ouest située sur le flanc occidental de la montagne thébaine. Son aspect est bien curieux, elle semble dominer le Village et ses tombes s'étagent les unes au-dessus des autres meublant la pente de la montagne à la manière de terrasses successives. Les fouilles ont dénombré cinquante-trois tombes datant presque toutes du règne de Ramsès II.
Sept autres tombes datent de la dynastie XVIII dont celle de Sennefer et celle de l'ouvrier Khâ, Chef des travaux dans la Grande Place et Scribe royal sous Amenhotep II, Thoutmosis IV et Amenhotep III et dont le décès est survenu sous le règne de ce dernier Pharaon. Bien malheureusement, la chapelle fut retrouvée pillée mais la tombe par contre fut retrouvée intacte. Les deux sarcophages, celui de Khâ et celui de son épouse Meryt reposaient l'un à côté de l'autre come au premier temps de leur inhumation. Celui du défunt avait conservé son suaire protecteur tandis que des guirlandes entouraient le cercueil. Son épouse, quant à elle, avait conservé son masque funéraire doré. Les deux époux ainsi que tout l'important matériel trouvé à leurs côtés (oushebtis, vases, chaise, coffres, étoffes, …) furent transportés au musée de Turin.
Les tombeaux de la dynastie XIX, les plus importants et les plus significatifs, sont presque tous décorés, chacun présentant leur propre particularité mais obéissant à un schéma d'ensemble identique. Contrairement aux tombes plus anciennes, le caveau est désormais destiné à l'ensemble de la famille, ce sont tous les membres du clan qui sont invités à y prendre place et il est probable que ces demeures sont considérées comme des biens mobiliers à transmettre de père en fils. Ainsi une des tombes les plus célèbres, celle de Sennedjem abrite-t-elle non seulement le défunt et son épouse mais aussi son fils, sa belle-fille et d'autres parents.
Nakhtamon, essoufflé, accablé par la chaleur qui se fait de plus en plus oppressante
malgré l'air dispensé par le large éventail de plumes balancé au-dessus de sa tête, arrête là son discours.
Il lève les yeux sur la personne de Pharaon : Ramsès le regarde toujours, son air attentif et intéressé rassure le jeune homme sur la qualité de ses propos !
Soudain le Roi parle, sa voix porte haut, ses paroles résonnent, amplifiées par le silence qui s'est abattu sur l'assemblée au moment même où il a ouvert la bouche :
" Jeune homme, ne crois-tu pas qu'il est temps que tu me fasses visiter ces tombes mystérieuses, ma patience est mise à rude épreuve ! Sais-tu ce que l'on dit au Palais royal à propos de vos tombeaux ? Non, tu ne le sais pas, bien sûr, mais je puis t'assurer que la réputation de tes collègues est arrivée jusqu'à mes oreilles et que je ne suis pas resté insensible aux compliments qui fleurissent sur vos ouvrages. On dit que vos demeures d'éternité sont encore plus belles que celles de mes hauts dignitaires, ces rumeurs sont-elles fondées, la beauté, l'unicité de la tombe royale aurait-elle à souffrir d'une telle concurrence ? Je demande à voir, mène moi à ces merveilles que je juge par moi-même ! "
Du coup Nakhtamon a chaud, très chaud, et cependant il tremble !
La chaleur serait--elle vraiment en cause ? Il a cru discerner dans les propos de Ramsès une petite pointe d'agacement.
Qu'à cela ne tienne, il le conduira sur place…
Ramsès se lève, Nakhtamon ouvre la marche, c'est une troupe entière qui se déplace et qui franchit la porte du Village.
Sur les flancs montagneux, les chapelles attirent immédiatement l'intérêt sur elles, leur petit toit pyramidal accroche le regard.
Ramsès fortement intéressé n'a encore jamais vu un paysage aussi curieux..
DESCRIPTION D'UNE TOMBE

Comme dans tout monument funéraire égyptien, la tombe se décompose en deux éléments : la chapelle et le caveau. Mais avant d'accéder à la chapelle, il faut franchir un petit pylône fait de briques, réplique miniature des grands pylônes de Karnak. Une fois franchie cette porte, on pénètre dans une cour ceinte d'un mur lui aussi fait de briques et, au fond de cette cour, s'élève la fameuse chapelle.
Cet édifice est la partie visible de la tombe et sa façade principale est tournée vers l'Est. Sa fonction est d'accueillir les membres de la famille ou les amis venus rendre hommage à leurs disparus, les bras chargés d'offrandes de toutes sortes.
Selon le type de roche qui la reçoit, la chapelle est soit creusée à même la pierre si celle-ci est résistante, soit construite en brique si la pierre est trop friable. Photo Le long de la façade principale, une sorte de véranda soutenue par des colonnes peut abriter de chaque côté de la porte une statue du défunt.
La chapelle creusée dans le roc peut comprendre plusieurs pièces dont les parois sont décorées et très souvent sculptées avant d'être peintes sur un enduit de limon recouvert de stuc. Par contre, lorsqu'elle est construite, la chapelle est le plus souvent composée d'une salle voûtée décorée mais simplement peinte sur un enduit de limon.
Le plan d'ensemble ne varie guère : un couloir qui fait face à la porte d'entrée, une ou plusieurs salles et, au fond, la niche qui peut abriter une statue du défunt ou celle d'une divinité destinée à accueillir la momie pour la conduire sur les chemins de l'au-delà. Tout comme dans les temples, le niveau du sol peut s'élever en même que temps que celui du plafond peut s'abaisser pour conduire au naos.
Au-dessus de la chapelle se dresse la petite pyramide faite de briques qui intrigue tant Pharaon ! Sa face principale est percée d'une petite niche qui abrite une stèle dédiée à Rê-Horakhty. Tout comme ses grandes sœurs qui se dressent sur le plateau de Guizeh, la petite pyramide est surmontée d'un pyramidion de pierre, généralement de calcaire, parfois de grès (et non plus d'électrum comme les grandes !) décoré sur ses quatre faces de scènes se rapportant au cycle solaire, allusion faite au voyage que l'astre effectue de son lever à son coucher.
Le puits qui mène au caveau , la partie cachée, peut être creusé soit directement dans la cour ou dans une des pièces de la chapelle. Il semble que le fait d'avoir privilégié le puits creusé dans la cour ait protégé certaines tombes du vandalisme et du pillage de la tombe dans la mesure où il est bien sûr plus difficilement repérable.
La chambre souterraine, parfois précédée d'une antichambre, se présente comme une salle voûtée et sa fonction est d'abriter bien évidemment le cercueil du défunt mais aussi ceux des autres membres de la famille, épouse ou enfants.
Que peut-on lire sur ces murs décorés, quels sont ces ornements dont la beauté remonte jusqu'aux oreilles de Pharaon ?
La plupart de ces tombes, une vingtaine ainsi recensées d'époque ramesside, sont décorées de scènes monochromes. Très souvent sur un fond blanc, les contours et les textes sont noirs tandis que les figures balancent entre ocre rouge et ocre jaune. Très peu de couleurs vives donc, certains auteurs pensent que cette absence de couleurs (bleu, vert ou rouge) compensée par la large palette des ocres dorés aurait pour finalité d'évoquer la couleur de l'or, la chair des dieux. Et pourtant l'extrême vivacité des tons proposés alliée à leur remarquable état de conservation frappe le visiteur qui ne peut que rester admiratif devant ces scènes tapissant entièrement le caveau.
Les sujets traités sur ces parois n'ont rien à voir avec ceux que l'on peut admirer dans d'autres nécropoles. En effet, ici, point de scènes de la vie quotidienne, point de figures bucoliques ou champêtres (exception faite de la tombe d'Ipouy), les artisans de Deir el-Medineh ont préféré s'inspirer des textes religieux qu'ils connaissent bien pour les avoirs dessinés dans les hypogées royaux tels le Livre des morts et le Livre des Portes. Ainsi vignettes et formules magiques tapissent les murs du caveau, les plafonds s'ornent de motifs et de textes religieux illustrés par de nombreuses divinités funéraires. La tombe de Sennedjem est très représentative de ce type de décor.







 

LES SANCTUAIRES, CHAPELLES ET ORATOIRES
Les artisans de Deir el-Medineh ont accordé une très grande place au sentiment religieux. Leur vie quotidienne est ponctuée non seulement de rites en l'honneur des défunts dont ils perpétuent le souvenir au cœur des chapelles de la nécropole ou simplement dans leurs demeures, mais aussi de rites en l'honneur de nombreuses divinités. Voir Piété et religion.
Plusieurs temples se sont alors dressés peu à peu au Nord du Village tandis qu'une multitude de petites chapelles votives, de sanctuaires, d'oratoires sont creusées au pied de la montagne thébaine.
Le temple d'Hathor
Au Nord du Village se dressent encore de nos jours, les ruines du temple dédié à la déesse des lieux, la belle Hathor, la Souveraine de l'Occident. Ce monument d'une très grande finesse est encore mal connu mais son importance théologique ne fait pas de doute. La construction est relativement récente, son exécution remonte aux temps des Lagides, plus précisément ce fut Ptolémée IV Philopator qui en ordonna la construction, le culte en l'honneur de cette divinité étant encore extrêmement vivace à cette époque. Edifié dans un matériau d'éternité, le grès du Gebel Silsileh mais aussi grâce à l'emprunt de pierres récupérées sur des sites voisins, ses fondations reposent probablement sur les arasements de l'ancien temple de Ramsès II qui avait lui même construit ce temple sur les vestiges arasés de celui de son père Seti I ! La conception de ce temple aux formes élégantes alliée à la remarquable conservation des peintures polychromes que l'on peut encore admirer font de cet édifice une véritable petit bijou d'architecture. Globalement, on pénètre d'abord dans une sorte de vestibule dont le plafond est soutenu par deux colonnes, puis l'on accède au cœur d'une antichambre au fond de laquelle sont alignées trois salles, trois chapelles dédiées de gauche à droite ou du Sud au Nord : à Amon-Sokaris-Osiris  puis à Hathor-Maât au centre et enfin à Amon-Rê-Osiris

L'oratoire de Ptah et Meretseger
Sur la route menant à la Vallée des Reines, à mi-chemin entre cette nécropole royale et le Village des artisans se dresse un curieux éperon rocheux dont la forme rappelle la tête d'un serpent prêt à cracher son venin. Les villageois, grands amateurs de symboles comme tout bon égyptien antique, ont voulu voir sculptée naturellement dans la pierre l'image de la déesse Meretseger. C'est ici que se trouve, creusé dans le roc, un oratoire très simple consacré à la déesse serpent et à un autre dieu, le grand Ptah de Memphis. Ce lieu de piété est très fréquenté, s'y rendent non seulement les artisans qui y font une halte avant d'atteindre la Vallée des Reines mais aussi tous les habitants du Village qui viennent porter aux oreilles des divinités leurs désirs, leurs peines et leurs espoirs.
LA STATION DU COL
Sur le chemin qui mène cette fois-ci au Grand Lieu, à la Vallée des Rois, se dressent les ruines d'un bien étrange petit hameau dont les maisons semblent comme agglutinées les unes aux autres. Nous avons atteint ici la station du Col, ce lieu intermédiaire entre la Vallée des Rois et pa demi conçu par les ouvriers qui, trop fatigués après une journée de dur labeur dans la chaleur des tombes, rechignent à descendre jusqu'au Village. C'est une sorte de campement hâtif fait de soixante-dix-huit petites cabanes très sommaires destinées à recevoir les ouvriers de façon temporaire. L'architecture est simple, le confort est très rudimentaire, nulle trace de cuisine dans le plan de ces maisons ce qui laisse à penser que les épouses viennent elle-mêmes du Village porter leurs repas à leurs maris. Le temps doit leur paraître bien long à ces artisans, loin de leur famille bien-aimée. Aussi ont-ils trompé leur ennui en gravant sur le roc de la montagne qui les entoure des graffiti révélant leur nom, leur fonction, autant de témoignages sensibles et touchants venus alimenter les archives de la communauté. C'est ici que Bernard Bruyère trouva de nombreux sièges marqués au nom de leur propriétaire ainsi qu'une cabane attribuée au fameux scribe Kenherkhepechef.
LE GRAND PUITS
Et la rumeur affirme qu'en ces lieux mystérieux, on aurait aperçu, un jour, un magnifique linteau de calcaire orné d'un soleil d'or, flanqué d'ailes multicolores. A l'extérieur du Village, au Nord du temple ptolémaïque les explorateurs des temps modernes firent, un jour, une découverte quelque peu déroutante, une profonde et mystérieuse fosse. Deux longues années de fouilles furent nécessaires pour entrevoir quelque lumière au fond de ce grand trou béant, profond de cinquante mètres et dont le premier creusement fut probablement entamé dès la dynastie XX dans le but illusoire, malheureusement, de trouver un peu d'eau. Cet essai fut tenté de nouveau durant la période ptolémaïque toujours dans le même espoir, trouver le liquide vital nécessaire à l'autonomie du temple. Mais en vain. Le puits fut abandonné et, peu à peu, il devint la décharge du temple où les prêtres entassèrent tous les déblais qui les encombraient. Une aubaine pour monsieur Bruyère qui, au crépuscule de son existence, toujours aussi alerte, curieux et consciencieux, n'hésita pas à remuer près de six mille mètres cubes de terre pour exhumer, enfin, un véritable trésor non point composé d'or et de bijoux mais de milliers d'ostraca (près de cinq mille !) datant de l'époque ramesside.

Sources
Les Créateurs d'éternité. J. Rome
Les artistes de Pharaon. Catalogue du Louvre 2002
La confrérie des bâtisseurs de Pharaon. M. Bierbrier

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